Portrait de postdoc' : Anne-lise Rias (Institut Pascal - LISC/INRAE)
Anne-lise Rias
Rattachements, encadrant-e-s: Institut Pascal - Hélène Chanal ; Laboratoire d'Ingénierie des Systèmes Complexes (LISC/INRAE) - Jean-Denis Mathias
Peux-tu revenir sur ton parcours académique qui t’a mené jusqu’au Pôle ?
Mon parcours académique s’est construit autour d’un intérêt pour la conception d’objets , comment on les invente ? à qui ça peut servir ? comment c’est fabriqué ? Un Master en conception de produits m’a permis de mettre en pratique les étapes du processus, depuis les premières idées créatives jusqu’à la fabrication. Cela a aussi éveillé ma curiosité sur l’innovation et sur les outils numériques de conception et de production (impression 3D, découpe laser, etc).
Ensuite, un Master Recherche au laboratoire Conception de Produits et Innovation LCPI de l’École Nationale Supérieure des Arts et Métiers à Paris a permis de me spécialiser en méthodes de conception. J’ai poursuivi par une thèse de doctorat au LCPI, avec l’entreprise industrielle Poly-Shape spécialisée en fabrication additive métallique, une technologie de production émergente en 2014.
Ce parcours et mes expériences professionnelles qui ont suivi m’ont fait prendre la mesure de la responsabilité environnementale et sociale attachée au fait de pousser l’innovation basée sur une technologie, de concevoir des produits et les fabriquer. Prendre en compte l’état de dégradation globale de la Terre et la nécessité de s’adapter aux effets des dérèglements m’a conduit à développer et pratiquer d’autres approches, méthodes, outils tels que : éco-conception, prospective, outils de médiation entre des parties prenantes, analyse de cycle de vie, etc ; et à privilégier des missions contribuant à l’adaptation du territoire où je vis.
Cela m’a finalement menée à choisir de revenir à l’enseignement et à la recherche académique et démarrer, en mars 2025, un post-doctorat avec le Pôle des Sciences de la durabilité.
Quel était le sujet de ta thèse et quelle en était la problématique centrale ?
Ma thèse (2014-2017), intitulée « Créativité par et pour la fabrication additive : proposition d’une méthodologie outillée » s’inscrit en sciences de la conception, spécialité génie industriel. Elle visait à outiller les phases amont du processus de conception de produits afin d’explorer puis exploiter le potentiel de la fabrication additive métallique, l’une des technologies pilier de l’usine du futur, considérée plus soutenable comparativement à d’autres procédés de production industriels.
Convier la créativité en sciences de l’ingénieur a permis de travailler ce sujet non uniquement d’un point de vue technique, afin de contribuer à privilégier un usage « raisonné » de cette technologie, c’est-à-dire tirant partie de ses spécificités (la complexité géométrique qu’elle permet, la réduction de matière première, etc) tout en tenant compte des effets de son intégration dans l’industrie et de ses impacts.
Comment en es-tu arrivée à t’intéresser aux Sciences de la durabilité ? Et en quoi cette approche te semble pertinente pour mener à bien ton projet post-doctoral ?
Les Sciences de la durabilité ont 4 caractéristiques, conduisant à y inscrire mon projet intitulé « Vers une usine du futur, territorialisée, intégrant les limites planétaires ? ».
Les Sciences de la durabilité traitent la complexité, c’est-à-dire des sujets qui entremêlent plusieurs dimensions interdépendantes. Ce projet présente au moins des composantes technique-écologique-sociale et territoriale. Des sujets qui concernent des parties prenantes aux priorités différentes voire contradictoires, ici des investisseurs industriels, des responsables politiques du développement du territoire, des élèves ingénieurs ou encore des groupes citoyens soucieux des défis climatiques. Des sujets adressant des problèmes qui n’ont pas de solution unique, ce qui est le cas quand on questionne le devenir de l’industrie manufacturière dans les quatre Territoires d’Industrie du Puy-de-Dôme, situés dans le Massif Central.
Les Sciences de la durabilité invitent à intégrer l’incertitude et le risque, ici inhérents au sujet lié au cadre des limites planétaires et à la transgression de ces limites. Cette caractéristique fait par ailleurs écho à l’objectif du projet qui est de formuler des scénarios prospectifs faisant varier plusieurs paramètres à propos de la trajectoire d’évolution de l’industrie dans les territoires cités, et chercher une trajectoire compatible avec les limites planétaires.
C’est une approche qui revendique aussi l’interdisciplinarité, ce qui devrait s’avérer bien utile pour travailler ce sujet empruntant des concepts et des méthodes aux sciences de l’ingénieur, aux sciences du climat et de l’environnement et aux sciences sociales.
Enfin, en Sciences de la durabilité la recherche a une visée transformatrice, les connaissances produites doivent conduire à des actions concrètes pour transformer les pratiques en place. Ce projet pourrait en ce sens intéresser les parties prenantes des Territoires d’Industrie, des responsables politiques locaux, des entreprises industrielles ou encore l’enseignement en conception de produits.
Publications et communications :
Anne-Lise Rias, et al., « (Ré)animer une culture territoriale du risque », Traits d'agences, #136, 2023, pp. 10-11. https://aucm.fr/article/re-animer-une-culture-territoriale-du-risque/
Anne-Lise Rias, et al., « Risques systémiques, vulnérabilités et stratégies de résilience territoriales. Synthèse pour les organisations », Sens neuf groupement de PME, 2022.
Anne-Lise Rias, et al., « Towards additive manufacturing of intermediate objects (AMIO) for concepts generation, International Journal on Interactive Design and Manufacturing », IJIDEM, 11(2), 2017, pp. 301-315
Anne-Lise Rias, Créativité par et pour la fabrication additive : proposition d’une méthodologie outillée, thèse de doctorat en Science des Métiers de l’Ingénieur, Paris, École Nationale Supérieure d’Arts et Métiers Paris, 2017.
Brevets d’invention :
Anne-Lise Rias, et al., « Method for integrating a foreign body within a workpiece obtained through additive manufacturing by selective laser melting », European patent 3323532, 2018.
Anne-Lise Rias, et al., « Method for identifying an original component at least partially manufactured by additive manufacturing using metal powder, and method for authenticating a component », European patent 3330021, 2018.